jeudi 25 avril 2024
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Le manque de médicaments au croisement des maux de la santé

Par Aida Borgi / Kaouther Zribi / Emna Zribi – FOURMIZ
Nous avons depuis des mois alerté sur le problème de manque de médicaments, manque qui touche parfois des produits vitaux pour lesquels les alternatives thérapeutiques sont limitées, voire inexistantes.
Ce manque se voit aussi bien dans le privé que dans le public.
Que se cache derrière tant de manquants ? Et y a-t-il des solutions à ces problèmes ?
– Est-ce les problèmes financiers de la Pharmacie Centrale de Tunisie (PCT) ?
L’endettement de la PCT avec un problème de paiement de ces fournisseurs accentué par la dévaluation du dinar a rendu la PCT, à l’origine un acquis et un garant de la sécurité et de la disponibilité des médicaments incapable d’assurer son rôle d’approvisionnement du marché.
Cet endettement est lié aux problèmes financiers des hôpitaux et de la CNAM.
Dans l’immédiat, il est nécessaire d’appliquer une priorisation du paiement de la PCT dans le budget des hôpitaux qui aujourd’hui privilégie les fournisseurs privés de dispositifs médicaux au dépend de la PCT, en attendant des solutions de fond de gouvernance aussi bien pour les hôpitaux que pour la CNAM. Il est bien sûr à noter que ces fournisseurs menacent d’arrêter la livraison des dispositifs contrairement à la PCT qui continuent à fournir les hôpitaux malgré tout.
– Est-ce un problème de gouvernance au niveau des hôpitaux ?
Nos hôpitaux souffrent d’une situation financière précaire à l’origine de leur endettement auprès de la PCT principalement ainsi qu’auprès des fournisseurs de dispositifs médicaux.
Des problèmes de gestion, sous facturation des actes (par exemple une intervention dont le coût entre matériel et acte dépasse 4000 DT peut être facturée à 100DT), une baisse de l’activité pour les malades payants et CNAM détournés dans certaines situations vers le secteur privé ou dans le cadre de l’APC, une corruption touchant différentes étapes du circuit : vol de médicaments, complaisance pour certains actes constituant une source d’entrée d’argent pour les hôpitaux (si tu as un bon relationnel tu peux faire des bilans biologiques ou une radio sans payer un sou) sont à l’origine de cette situation. Se rajoute à cela le cercle vicieux des dettes de la CNAM et une charge sociale de plus en plus importante supportée par les hôpitaux.
Dans l’immédiat, on peut envisager la mise en place d’une traçabilité informatique des médicaments ainsi que des actes médicaux (bilans, radio, interventions chirurgicales…) qui a démarré dans certaines structures mais dont l’avancement demeure lent de part la résistance de ceux qui profitaient de ce système.
Une réforme avec une mise à jour du système de facturation doit être réfléchie entre les payeurs (CNAM, assurances, l’état …) et les hôpitaux pour une tarification conforme au coût réel des actes.
– Est-ce un problème de gouvernance au niveau de la CNAM ?
La CNAM : un mauvais payeur à l’origine des problèmes financiers des établissements publics et privés.
Sécuriser le circuit des médicaments et revoir la traçabilité des remboursements (prises en charges fictives…) pourraient être une priorité pour pallier ces problèmes.
– Est-ce un problème de fuite des médicaments vers les pays voisins ?
Ces fuites touchant des produits chers vitaux et souvent subventionnés par l’état ont aggravé le manque de ces médicaments dans les secteurs public et privé.
Renforcer le contrôle et surtout l’inspection pharmaceutique permettrait de limiter ce phénomène.
Il est bien évident que la PCT hôpitaux publics et CNAM sont des acquis à préserver pour la santé du citoyen, et une réforme du système de santé doit être axée sur la protection de ces partenaires tout en apportant les garanties nécessaires d’une bonne gouvernance.

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