mardi 19 mars 2024
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Fiscalité des avocats : que chacun sache raison garder

Par Zouhair BEN JEMAA

Avouons-le, nous avons collectivement contribué à la complexité et à l’affaiblissement de notre système fiscal, et ce depuis un bail. Depuis le temps où le Directeur Général des impôts voulant satisfaire son maître de Président, jouait sur deux leviers : l’élargissement de l’assiette fiscale, ou l’augmentation des taux ; en modifiant les règles à chaque loi de finances, et en votant une amnistie fiscale toutes les quatre années ! Cela a toujours profité aux mafieux et aux bandits, et frustré les honnêtes contribuables et les gens de bonne foi. Le système fiscal est devenu trop complexe et avec trop de particularités difficiles à suivre ! Ce qui se passe entre les avocats et le gouvernement découle de l’absence de communication qui rend difficile toute tentative de relation pacifique et maîtrisée ! Nous avons d’un côté le repli corporatiste, et de l’autre le refus de dialogue, causant ainsi une rupture profonde avec les valeurs de notre culture, et rendant plus difficile la possibilité de mettre en mots les bonnes pensées avec sérénité et maîtrise ! Devant ce spectacle désolant, les meutes d’apprentis sorciers se sont mises à hurler en soufflant sur les braises à des fins populistes et électoralistes, ça c’est le côté décor !
Sur les huit mille avocats que compte le barreau, près de quatre mille sont des jeunes débutants qui ont un mal fou à boucler leurs fins de mois et qui n’ont aucune trésorerie pour payer la moindre taxe par avance, près de 10 % des hommes et femmes en robes noires gèrent près de 80 % du business national, laissant à près de 90% de leurs collègues à peine 20 % du volume des affaires du pays. Avant la guéguerre du moment, les avocats payaient le tiers provisionnel sur le chiffre d’affaires de l’année précédente, subissaient la retenue à la source de 5 ou 15 %, et régularisaient en fin d’année par leur déclaration définitive. La profession mal inspirée, a proposé sans qu’on le lui demande pour la nouvelle loi de finance, un timbre libératoire sur chaque affaire, ce qui est ubuesque de la part de l’équipe nouvellement élue. L’administration a sauté sur l’ânerie et gardé l’idée du timbre sans accepter le terme libératoire, réponse du berger à la bergère. A la décharge de l’administration fiscale, une grande partie des avocats, peut-être par négligence, ne font même pas de déclarations, ce qui n’est pas à l’honneur de ceux qui sont sensés représenter la légalité ! Menaces de grèves d’un côté, diabolisation du métier d’avocat de l’autre, et on ajoute ainsi du désordre au désordre. Quand on discute avec les sages des incriminés, on se rassure vite d’apprendre que les avocats acceptent le principe de payer leurs impôts à taux raisonnable, mais exigent, à juste titre, l’égalité devant l’impôt sans que le gouvernement oublie, ni fait semblant, les contrebandiers et les mafieux, ils veulent s’assurer que leurs jeunes collègues ne soient pas ignorés dans leurs difficultés quotidiennes, et enfin ils demandent des garanties de justice fiscale et de bonne application de la loi vis-à-vis de tous les citoyens, y compris les avocats ; ces avocats qui, tout compte fait, ne sont pas pires que les autres Tunisiens, et il n’est point question d’être indulgent avec ceux d’entre eux qui fraudent individuellement ! Notre système fiscal est malade, souffrant d’une accumulation de textes tordus et ouvrant la voie à tous les dérapages, les règlements de comptes et la corruption qui gangrène tout notre tissu économique. Pour revenir à de meilleurs sentiments, il ne faut pas oublier que la Tunisie est hélas un pays divisé, et que les contribuables ont besoin de toute urgence de textes clairs, justes et acceptés par tous. Une commission de sages pourrait se pencher sur l’élaboration de ces textes qui simplifieront à outrance notre système fiscal, et supprimeront les tentatives de fraudes et de corruption ! L’écoute et la considération sont indispensables pour nous permettre une vie collective et pour permettre à l’Etat un bon fonctionnement ! « Un gouvernement a pour mission de faire que les bons citoyens soient tranquilles et que les mauvais ne le soient pas », dixit le grandissime G. Clemenceau !

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A propos de Zouhair BEN JEMAA

Expert en art culinaire et en hôtellerie. Actif de la société civile dans le domaine de la santé. Chroniqueur et écrivain.

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